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Notre désir est sans remède



Quand la jeune Frances est apparue dans des productions de la Paramount ou de la MGM, à la fin des années 1930, on a d’abord apprécié sa blondeur, ses pommettes hautes, son menton dédaigneux, sa raisonnable impertinence. On l’a dite tour à tour provocatrice, communiste, féministe, athée, amoureuse. Puis on l’a déclarée folle et les dispositions nécessaires ont été prises. Son indocilité affichée dérangeait Hollywood et la bonne société américaine, qui n’acceptaient pas qu’elle déborde le cadre auquel on voulait la cantonner.

En évoquant le destin de cette femme dont seul le corps aura été considéré – sublimé par les chefs op, admiré par les fans, contraint par la justice, brisé par la médecine –, Mathieu Larnaudie, qui attaque (comme on le dirait d’un acide) le réel par la fiction pour donner à penser le contemporain, livre une réflexion politique sur l’image et l’individu. De la lumière à l’ombre, des écrans de cinéma à la claustration puis à une forme plus insidieuse d’exposition,« Notre désir est sans remède» suggère que la célébrité est peut-être la manière la plus irrémédiable d’échapper à soi-même, ou de se perdre.


“À de rares exceptions près, les fictions biographiques consacrées à des femmes mettent traditionnellement en relief les aspects psychologiques, voire pathologiques de leur vie. Là où les hommes se trouvent jetés dans de nobles aléas historiques auxquels ils se mesurent, les personnages féminins demeurent le plus souvent cantonnés à des sphères plus intimes et affectives, comme si leur sort restait imperméable aux circonstances et aux mutations du monde qui les entoure : comme si elles n’étaient pas, elles aussi, des sujets à part entière de l’Histoire.

En m’inspirant ici librement de la vie de Frances Farmer, j’ai voulu rendre sensible, dans toute sa dimension politique, l’itinéraire d’une actrice qui, après un début de carrière prometteur, se trouve, parce qu’intransigeante, parce qu’indocile, mise au ban de la société hollywoodienne d’abord, puis de la société tout court – internée pendant près de dix ans dans les conditions sordides et violentes qui étaient celles de la psychiatrie américaine des années 1940. Ainsi se dessine l’aventure d’un corps pris dans les turpitudes et les contradictions de son époque, qui excède la place et le rôle qu’on souhaitait lui assigner, et qui déborde l’image où l’on aurait voulu qu’il demeurât.

Car ce roman est aussi une méditation sur l’image, ou, plus exactement, sur le pouvoir iconique : quelle force de fascination, quelle influence morale, quelles implications historiques l’avènement du cinéma, plus tard celui de la télévision, et la généralisation du spectacle et du divertissement ont-ils pu exercer sur la société de leur époque, sur l’individu démocratique qu’elle portait ? Et comment ont-ils affecté les corps qui s’y sont trouvés engagés – qui en ont été, littéralement, les acteurs ?

À travers ce portrait de femme insoumise, cette tentative de reconstitution d’une icône brisée, c’est ce point énigmatique et impérieux où notre regard et notre désir se confondent que j’ai voulu interroger, et peut-être approcher.’’

M. L.

août, 2015
11.50 x 21.70 cm
240 pages


ISBN : 978-2-330-05310-9
Prix indicatif : 19.30€



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Ce livre existe également en version numérique

Et puis il y a Frances Farmer, incandescente, dont il choisit d'éclairer le corps et les traits, comme découpés par les lumières des projecteurs, sans que jamais la psychologie ne s'en mêle, laissant le lecteur à la beauté d'une femme mystère.

Muriel Plantier, Midi Libre

Alors que le patrimoine iconique qu'elle recycle semblait la rendre superflue, la littérature alors peut faire valoir ses compétences spécifiques. Nul mieux qu'elle ne sait suspendre le temps, émietter le tableau en détails, rcnvcrscr capricieusement les hiérarchies romanesques : au commissariat un bout de tapisserie robbegrilletesque dont Frances « restaure la collure disjointe, qui tient quelques secondes en l'état puis se détache, et, de nouveau, se recourbe imperturbablement » prend plus d'importance que la story trop connue de la déchéance. Que
peut le texte avec les images rebattues ? Se les repasser, mais en variant les angles, en changeant les focales « en recadrant la photo sur son visage, on pourrait presque la croire sortie d'un film ».

François Begaudeau, Transfuge

Avec humour, distance et un vrai talent d’écriture, ce roman met en lumière la puissance de l’image et la déformation du réel qu’elle génère. Une réussite.

Femme majuscule

En reconstituant l’itinéraire de l’actrice indocile et intransigeante, Mathieu Larnaudie implique le lecteur dans une réflexion sur la fascination de l’image, sur les dessous de la production, et la tentative de reconstruction d’une icône brisée. Le style incisif et l’intelligente articulation du récit assurent une lecture captivante.

Mémoire des arts

D’une plume dense et lyrique, épileptique et vandale, Larnaudie (…) pénètre les terres délaissées d’une vérité nue et vertigineuse – dit le cri du corps spolié. Avec la foi du désastre, il circonscrit les errances intimes d’une femme sacrifiée sur l’autel de nos regards, d’où exhale la triste antienne d’une vie en pure perte.

Benoît Legemble, Transfuge

Ce récit intelligent est moins le portrait d’une chute qu’une méditation politique sur l’image et son pouvoir (idéologique, notamment). Toujours d’actualité…

Causette

Très loin du biopic, l'écrivain réinscrit l'histoire de cette indocile, bannie d'Hollywood puis psychiatrisée, dans le champ politique de l'Amérique bientôt maccarthyste. Passionnant.

Dominique Conil, Mediapart

Mathieu Larnaudie a le talent de réveiller en chaque lecteur des scènes mythiques. (...) Un livre tendu, remarquablement documenté.

Bernard Génin, La Vie

Pour son septième livre, Mathieu Larnaudie a parfaitement joué sur deux tableaux : celui du portrait d'une actrice hollywoodienne, Frances Farmer, et celui d'une certaine Amérique dans la première moitié du XXe siècle. (...) Ce portrait, articulé en sept tranches de vie, avec zooms, contrechamps et flash-backs, nous montre une femme écorchée, scandaleuse et libre. (...) Sans aucun doute, le meilleur opus de Larnaudie, aux côtes des Effondrés.

Thierry Clermont, Le Figaro Littéraire

Une insolence radicale que nous ne pouvons que saluer et que le livre de Larnaudie, riche aussi en réflexions sur le corps et sur I 'image, fait rayonner.

François Poirié, Artpress

Une envoûtante réflexion sur le pouvoir destructeur de l'image.

C'est d'abord au spectacle d'une déshumanisation progressive que l'écrivain convie le lecteur. Avec, pour fil rouge, cette question cruciale : à quel moment devient-on indésirable aux yeux de la société ?

Jeanne Ferney, La Croix

Et puis il y a Frances Farmer, incandescente, dont il choisit d'éclairer le corps et les traits, comme découpés par les lumières des projecteurs, sans que jamais la psychologie ne s'en mêle, laissant le lecteur à la beauté d'une femme mystère.

Muriel Plantier, Midi Libre

[Mathieu Larnaudie] poursuit là une œuvre déjà parmi les plus ambitieuses du paysage littéraire contemporain, traversée par la fascination pour les figures du pouvoir et de I’oppression.

Olivier Mony, Sud Ouest le Mag

Jamais dans cette réflexion cruelle sur l'industrie du divertissement et la fabrique de l'individu contemporain ne trouve t-on ce qui fait le défaut majeur des monographies consacrées aux actrices : la psychologisation obscène des sentiments. Merci !

La phrase se fait plus nerveuse, pour mieux cadrer en sept plans serrés, comme autant de moments clés d'une existence, entre 1936 et 1958, le corps d'une femme broyée par la gloire.

Sarah Chiche, Marianne

L'écrivain s'est librement inspiré de la vie de Frances Farmer pour ce portrait de femme insoumise qui riait trop fort.

Alexandre Fillon, Livres Hebdo

[Un] livre à l'écriture fluide et brillante, pareille à une mer d'or dont on se rendrait compte, en s'y baignant, qu'elle regorge également d’acide.

Blandine Rinkel, Le Matricule des Anges

Dans toute légende, la chute suit l'ascension. Celle de Frances, le lecteur le découvrira, est peut-être politique, ou issue de ses propres démons. Devenue une icône, Frances Farmer est prisonnière de son mythe, dont le roman de Mathieu Larnaudie, qui est plus qu'une biographie, sait la désincarcérer.

Alain Nicolas, L'Humanité

À travers Frances Farmer, son ascension, sa chute, son internement, c'est toute la légende d'Hollywood que vous nous racontez. (...) Des moments très intenses… C'est vraiment du Tennessee Williams avec un regard de Freud.

Tewfik Hakem, France culture, "Un autre jour est possible"

Le très beau roman de Mathieu Larnaudie livre une réflexion politique sur l’image et l’individu à travers le destin mouvementé et tragique de Frances Farmer.

Nicole Debarre, “Entrez sans frapper” (La Première / RTBF)

Le récit impressionniste du tragique hollywoodien.

Marc Bertin, Sud-ouest

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