Années 1980. Deux apprenties cinéastes ayant grandi ensemble sur les collines de Los Angeles se lancent l’une dans des comédies à succès teintées de féminisme, l’autre dans la réalisation de documentaires provocateurs et exigeants. Éternelle complice de l’om brageuse Meadow, Carrie est l’ange gardien de son amie et la première spectatrice de ses tentatives pour capturer l’essence du monde, du mouvement, de la lumière. Mais bientôt, Meadow, l’artiste rebelle, se laisse entraîner par le désir d’en découdre avec le vivant. C’est ainsi qu’elle va un jour débusquer sa parfaite victime en la personne de Jelly.
Ex-malvoyante, cette quinquagénaire passablement abîmée s’est fait une spécialité non lucrative d’engager au téléphone, depuis son minable appartement, de longues conversations avec des hommes en mal de communication, qu’elle séduit, au sens fort, par la qualité de son écoute jusqu’à ce jour fatal où, contrevenant à toutes les règles qu’elle s’est ?xées, elle tombe amoureuse de l’un de ses interlocuteurs réguliers. De sa vertigineuse histoire d’amour téléphonique, Meadow veut tirer son chef-d’œuvre, et ce au prix d’une manipulation qui met en péril l’équilibre même de son innocent modèle…
Hommage au 7e art, interrogation sur l’identité et sur l’origine du geste créateur, «Les Innocents et les Autres» est à ce jour le plus ambitieux, le plus accompli et le plus envoûtant des romans de Dana Spiotta.
février, 2019
11.50 x 21.70 cm
352 pages
ISBN : 978-2-330-11819-8
Prix indicatif : 22.50€
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Depuis son premier roman Elles à L.A. (2003), elle n’a de cesse d’envisager sa littérature comme l’espace d’exploration des grands thèmes américains : l’invention de soi, la création des fantasmes, la manière dont l’espace et les choix façonnent les êtres. Et à travers son triple portrait de femmes, elle signe un roman somme, complexe et passionnant qui réunit une ode à l’amitié, un hommage au cinéma ainsi qu’une interrogation sur l’origine et les dérives de la création.
Hommage aux pellicules affûtées, Les Innocents & les Autres interroge à l'envi le processus créatif et les limites éthiques quand on interfère avec l'existence de sujets réels. Dans ce troisième roman au découpage habile, alternant narrations et articles de revues de niche, Dana Spiotta expose parfois plus spontanément les arêtes de son intellect que son coeur mais vous donnera, à n'en pas douter, envie de découvrir les films Portrait of jason de Shirley Clarke ou Killer of Sheep de Charles Burnett.
Un roman brillant sur le pouvoir, destructeur ou consolateur, des images.
Chant d’amour au septième art, Les Innocents & les Autres place ses personnages face à leurs lâchetés, leurs mensonges, leurs impostures. Puisque la vérité est souvent insupportable, fabriquons des légendes. (…). Que recherche-t-on à travers toutes ces images ? Les Innocents et les Autres apporte une réponse d’une simplicité biblique : « Une forme de consolation ».
Un beau roman ambitieux, traversé d'une grande érudition, notamment en matière de culture cinématographique, et une construction exigeante à travers les époques et les points de vue, mais qui n'empêche pas d'être constamment traversé par un vrai souffle romanesque et de passionner le lecteur friand de roman intelligent et profond sur la création artistique.
C'est pertinent et brillant, un roman qui offre au lecteur la sensation d'avoir vécu une expérience à part !
Méditation enlevée sur le rapport aux images et au corps, Les Innocents et les Autres conjugue brillamment références cinématographiques et destinées individuelles, dans un monde où le numérique n’avait pas encore fait son entrée. Reposant en grande partie sur les témoignages de ses protagonistes, le récit instaure un jeu subtil entre mensonges et vérités, qui trouve de multiples échos dans nos modes de vie contemporains où l’apparence prévaut souvent sur la réalité.
A travers l’histoire d’amitié liant Carrie et Meadow, astucieusement racontée sous forme de vidéoclips sur une trentaine d’années, et le foisonnement de références cinématographiques imprégnant son texte. Dana Spiotta explore la manière dont un individu se construit selon des références artistiques et culturelles. Une exploration aux échos décuplés à l’heure où le numérique et les nouvelles technologies ont acté l’omniprésence des images dans nos vies quotidiennes.
(…) sa façon de parler des films comme d’une matière vivante séduit : caméras et pellicules deviennent cette chose à dompter pour s’en nourrir. Aux mains de femmes, innocentes, ou pas.
C’est prenant comme tout et ça coule avec une fluidité inouïe alors même que ça nous crucifie constamment par la pertinence absolue à la fois du propos et de la forme. D’une intelligence folle et d’un charme total ! Pour ma part, une rencontre rare, un coup de foudre.
Disons-le d’emblée : l’expérience à laquelle Dana Spiotta convie son lecteur est peu banale. Il y a quelque chose de proprement vertigineux dans la manière dont la romancière américaine orchestre Les Innocents & les Autres. Ce qui n’enlève rien à son attrait : si ambitieux et complexe soit-il, ce quatrième roman capte l’attention et pousse au questionnement avec spontanéïté.
Techniques de réalisation, effets voulus et/ou produits, découpage, histoire du cinéma, jalons : l’érudition de Dana Spiotta est réelle, jamais pesante. Le jeu de miroir semble permanent entre l’exploration du Septième art et son propre travail de scénarisation du roman, entre les significations et les possibles.
Plongez sans tarder dans ce roman à tiroirs d’une richesse formelle vertigineuse. Peut-être au risque d’être déboussolé par les libertés narratives que s’autorise cette disciple de Don DeLillo. Des libertés euphorisantes à l’ère du produit culturel formaté pour la consommation instantanée et l’oubli rapide.
Les pouvoirs de l’image et la violence qu’elle provoque ne sont qu’un des multiples thèmes, brillamment enchâssés les uns dans les autres, de cette caustique réflexion sur la vie d’artiste. […]. Qu’est-ce qu’un artiste, interroge Dana Spiotta ? Un escroc et un magicien. Un voleur. Qui s’empare de ce dont personne ne veut. Tels ces aveux en tous genres, ces culpabilités de tous ordres qui nous hantent et dont chacun rêve de se libérer. [...] Dans ce roman construit comme un film aux multiples angles, aux travellings et flash-back incessants […], aux montages serrés enfin, Dana Spiotta quête non seulement la vérité de l’image mais la vérité des êtres.
L’auteure use d'une construction sophistiquée pour livrer une réflexion d’une grande finesse sur l’art et la vie, le réel et la fiction, tout en s’interrogeant sur la solitude et les moyens de la surmonter.
Dana Spiotta débusque les contradictions, les doutes et les rivalités qui parcourent la vie d’artistes. Dans un canevas mêlant confessions, séduction et manipulation, elle revient également sur la vanité et la course à la reconnaissance dans le milieu artistique. Sur les dégâts collatéraux des œuvres dans la vraie vie, aussi.
Le motif de l’amitié féminine compliquée, entre rivalité, complicité et pouvoir, croise ainsi une interrogation sur les choix artistiques, la tentation de l’avant-garde ou la séduction plus facile du feel good movie. A cette trame viennent se greffer des légendes urbaines californiennes au statut ambigu, (…). Ainsi, d'un chapitre à l’autre, la question du réel, de l’authentique, de la frontière invisible qu’il est ou non permis de franchir lorsque l’on crée, se pose et se dénoue.