Destiny

Tandis que l'Europe se hérisse de barbelés pour empêcher l'arrivée de ceux qui fuient la grande misère ou la guerre, il demeure de trop rares intellectuels pour prendre leur défense. Avec Destiny, Pierrette Fleutiaux le fait à sa façon, de romancière. Ce beau livre est important car il symbolise la main tendue aux migrants. Le contraire des barbelés…

Ce livre-là - un récit est-il précisé - ébouriffe, comme une bourrasque revigorante, nos prudences confuses vis-à-vis de cette réalité anonyme que sont les migrants. C'est un livre puissamment humain qui souligne en questionnant. Créant un face-à-face entre deux êtres bien réels, il déchire résolument le voile opaque qu'apprécient tant nos nonchalances aveugles. C’est aussi une belle histoire.

C'est un récit empreint d’incertitude, de questionnements. Pierrette Fleutiaux ne romance pas. Soucieuse d'exactitude jusqu’au scrupule, elle décrit l'âpreté de leur relation, surtout en ses débuts Bien que Destiny n'ait pas vraiment un profil séraphique, on songe à ce mot de l’épître aux Hébreux : « N'oubliez pas l’hospitalité : elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez eux des anges. »

 Un humanisme profond se combine en effet chez elle à une solide intelligence historique. Si son beau récit à valeur universelle, il ne gomme surtout pas les singularités de l'humain, ses grandeurs,ses faiblesses et ses lâchetés. Ne minorant aucune zone d'ombre de part et d’autre, Pierrette Fleutiaux prend le risque d'une totale lucidité. Et pour cela sans aucun doute emporte la conviction.

Il y a ceux qui bâtissent des murs infranchissables, et d'autres qui préfèrent ouvrir des portes. Pierrette Fleutiaux est de la seconde catégorie.(...) A l'heure où l’Occident voit les migrants comme une masse informe et impersonnelle, embarquée malgré elle sur des mers meurtrières, ce récit magnifique et bouleversant leur donne un visage. Et un prénom.

Dans toutes les pages, on sent que l'auteur a voulu écrire sur le beau thème de l’humanité partagée. Destiny, un roman aussi fort que singulier. Qu'il faut lire d'urgence et sans la moindre modération parce qu'il concerne tout un chacun.

Une aventure d’aujourd'hui, des plus touchantes.

L’analyse fine et sensible tente de saisir les raisons de cet attachement pour une inconnue et met en lumière une actualité malheureusement banalisée.

Les liens qui se tissent durant deux ans, entre Destiny et Anne, entre le début et la fin du livre, ne ressemblent à rien. Ni coup de foudre, ni grande amitié. Ils sont une expérience. Une étincelle d’humanité. Une petite bénédiction, perdue, inaudible, tandis que les barques chargées de migrants arrivent et continuent d’arriver .

Lucide, âpre, drôle, tendre et grave, « Destiny » revient sur une amitié peu banale et s'avère infiniment instructif sur ce qui et sur ceux qui traversent aujourd’hui notre société.

Un fragment puisé au coeur de la multitude qui vit les problèmes au quotidien. Mais un fragment qui en dit long sur les difficultés à tout comprendre.

Avec « Destiny », elle signe un livre profond et dérangeant, inattendu aussi, d'une totale actualité, (…). Avec une maîtrise littéraire remarquable.

Tandis que le train traverse les villes de banlieue, et que la nuit tombe, Anne Collongues projette alternativement la lumière sur Marie, Chérif, Liad, Frank et les autres, faisant émerger les singularités de chacun, en posant sur tous le même regard à la fois juste et doux.