Au printemps 1947, Marcel Carné et Jacques Prévert ont tourné un ?lm à Belle-Île-en-Mer, «La Fleur de l’âge». Celui-ci s’inspirait de la mutinerie survenue en 1934 dans le bagne d’enfants érigé non loin du Palais, le principal port de l’île. Il y était question d’amours impossibles entre un mutin en cavale (Serge Reggiani) et une riche estivante (Arletty), entre une jeune îlienne (Anouk Aimée) et un innocent mis en cage… De cette nouvelle collaboration, la huitième, le public attendait un chef-d’œuvre du même tonneau que «Le Quai des brumes» ou «Les Enfants du paradis». Et, en e?et, de l’avis unanime de ceux qui en avaient visionné les premières séquences, cette cuvée promettait un sommet. Mais le chantier resta en suspens, interrompu par les vents contraires. Et du ?lm inachevé, pas une séquence ne subsiste, ni même un rush. Rien donc, sinon quelques photographies de plateau. Malchance ? Torpillage ? La malédiction susciterait pas mal de rumeurs et autant de fausses pistes…
Le narrateur part à la recherche des bobines disparues, stimulé par de maigres indices et le témoignage de rares survivants. Son enquête fournit un ?l conducteur à l’évocation du cinéma français de l’âge d’or, depuis les années fébriles de l’immédiat avant-guerre, jusqu’à celles plus troubles encore de l’épuration ; une fresque oui, mais pitoyable et glorieuse, étincelante et pourtant entachée de zones d’ombre…
septembre, 2019
11.50 x 21.70 cm
192 pages
ISBN : 978-2-330-12521-9
Prix indicatif : 18.80€
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Le livre aurait dû s’appeler « l’Enfer de Carné ». Allusion directe à l’Enfer d’Henri-Georges Clouzot, autre film maudit [...] Ce livre à paraître, qui raconte, entre autres, comment le destin s’acharna sur la Fleur de l’âge, œuvre de Marcel Carné et Jacques Prévert, est finalement baptisé L’Ile des enfants perdus, titre initial du film en question. Signé Nicolas Chaudun (Actes Sud), il s’agit d’une saga passionnante, qui revient en détail sur l’épopée de ce tournage, suite de catastrophes et de coups du sort qui enterra définitivement un chef-d’œuvre annoncé, à moins du tiers de sa production.
Dans un roman-enquête bouleversant, servi par une plume à la fois légère et précise, Nicolas Chaudun ressuscite l’un et l’autre. Le lieu et l’œuvre. A la recherche des bobines de ce film mythique jamais sorti en salles, le romancier-conteur promène sa plume légère, aiguisée, fine, érudite, ironique, dans le tumulte politique, social et culturel des années 1930, au cœur des plateaux de cinéma durant la guerre et l’épuration, à Belle-Ile, durant un tournage chaotique.
Un récit chatoyant, amusant et sombre, rédigé avec style et esprit.
Lancé à la recherche du Graal ultime de la cinéphilie (les 25 minutes de « La Fleur de l’âge » tournées et montées par Carné, aujourd’hui introuvables), l’auteur se met lui-même en scène en enquêteur fiévreux. S’autorisant digressions et inventions, il bâtit un roman haletant, dont Anouk Aimée, dernière survivante de ce naufrage, s’impose en héroïne. Chroniqueur sur la chaîne Histoire et biographe du baron Haussmann, Chaudun s’approprie ainsi un fait historique, lui confère une tension contemporaine, et romantise l’extraordinaire échec. Avec panache et flamboyance.
L’écrivain réussit une captivante course-poursuite. Tambour battant, secondé par le baroque de sa langue, les époques sens dessus dessous et sa folle érudition, il nous transporte à la poursuite des jeunes rebelles, nous rappelle dans quelles eaux troubles le cinéma a trempé sous l’Occupation, nous embarque sur l’île où l’équipe se déchire sous des trombes d’eau et le regard mauvais des habitants.
On ne vous dira pas - c’est un roman, pas un essai - si, au Récamier puis chez elle, à Montmartre, Anouk Aimée donnera à l’auteur de « l’Eté en enfer », son vieil amoureux transi, le secret de « la Fleur de l’âge ». Du moins le lecteur aura-t-il eu la saisissante impression d’assister, page après page, à la projection d’un film catastrophe en 16 mm. Car, sur le papier, il existe enfin. Et il donne des frissons.
Chaudun prend à bras-le-corps cette Atlantide cinématographique. L’énigme d’un temps qui passe et efface les pas d’un cinéma désuni.
Nicolas Chaudun déroule le tapis d’embrouilles qui conduit à l’échec de la Fleur de l’âge. Deux cents plans sont tournés sur les
mille prévus.