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La poupée de Kafka



Au cours d’un séjour à Berlin, la jeune Julie Spieler, en quête d’une improbable réconciliation avec son père, Abel – séducteur impénitent, époux volage, menteur invétéré et professeur de littérature allemande à la Sorbonne –, débusque la récipiendaire putative de textes inédits de Kafka, écrivain qui fait l’objet d’une folle idolâtrie de la part de son inconséquent géniteur. La jeune fille entame alors de difficiles tentatives d’approche auprès de cette vieille dame particulièrement revêche qui porte en elle toute la mémoire d’un siècle traversé de guerres, d’exils et d’horreurs. L’été suivant, contre toute attente, ces trois personnages se retrouvent dans un chalet, face au mont Blanc, pour dénouer les noeuds et secrets obscurs dont chacun a tressé sa vie.

De Paris à Berlin en passant par Prague, sous l’éternel regard de l’iconique Kafka ou dans l’inquiétante ombre portée d’une impériale montagne, le roman fait se rencontrer les vivants et tous les spectres qui les hantent sur une scène où les protagonistes se débattent comme pour échapper au cruel sortilège qu’ils ont eux-mêmes concouru à forger.

Convoquant une structure narrative limpide où le réalisme le dispute aux images mouvantes et la gravité à un humour féroce, Fabrice Colin mène ici une superbe enquête romanesque sur les liens qui nous lient et nous délient au fil d’une libératrice traversée des apparences.


“En 1923, à Berlin, Kafka rencontre dans un parc une fillette en pleurs, qui a égaré sa poupée. L’écrivain la réconforte. La poupée n’est pas perdue, affirme-t-il, elle est simplement partie en voyage ; d’ailleurs, ne lui a-t-elle pas écrit – n’a-t-il pas gardé les lettres ? Confronté à l’incrédulité de l’enfant, Kafka rentre chez lui et, dans un état de grande faiblesse (il ne lui reste que quelques mois à vivre), rédige les missives en question. Pendant trois semaines, et par sa plume, la poupée raconte sa vie. Dans son dernier courrier, elle annonce qu’elle s’est mariée et doit mettre un terme à sa correspondance. Rassérénée, la fillette accepte cette conclusion. La littérature, en un sens, l’a délivrée de sa douleur.

De cet épisode singulier, on ne trouve nulle mention dans l’oeuvre de Kafka ; seule Dora Diamant, sa compagne d’alors, s’en est fait l’écho en son temps. Quant aux lettres, personne ne les a jamais vues. Que sont-elles devenues ? Qu’est devenue la fillette ? La Poupée de Kafka est une réponse romanesque à cette double question. Si le fantôme de l’écrivain praguois y erre littéralement tel un ange scrutateur, j’ai surtout trouvé en ce livre l’occasion de creuser des thématiques qui me sont chères : l’art déchirant du mensonge, le pouvoir curateur de la narration (« tous les chagrins, écrivait Karen Blixen, sont supportables si on fait une histoire »), le lieu intérieur où vie réelle et fiction gisent indissociées. Else Fechtenberg, ma vieille héroïne atrabilaire aux nuits rognées de cauchemars, a depuis longtemps opté pour le silence. Mais le destin a ses caprices ; dans un chalet donnant sur le mont Blanc, j’organise ses retrouvailles avec une jeune amie idéaliste et le père de cette dernière. Tous ont de bonnes – lire « douloureuses » – raisons pour cesser de mentir.

F. C.

janvier, 2016
11.50 x 21.70 cm
272 pages


ISBN : 978-2-330-05783-1
Prix indicatif : 20.00€



Où trouver ce livre ?
Ce livre existe également en version numérique

Un roman merveilleux de style et de sensibilité.

Gilles Heuré, Télérama

C'est une histoire d'amour entre un père et sa fille, une histoire d'apprivoisement sur lequel plane la figure silencieuse et tutélaire de Kafka (…) c'est un très joli livre.

Elodie Fondacci, Radio Classique

 Auteur pour la jeunesse, Fabrice Colin s'est penché, dans La Poupée de Kafka (Actes Sud), sur un mystérieux roman épistolaire qu'aurait écrit l'auteur du Procès à l'attention d'une fillette, au soir de sa vie, à Berlin. L'occasion pour lui de revenir sur l'œuvre et la vie de l'écrivain praguois.

Tierry Clermont , Le Figaro

 Partant de l'épisode, Fabrice Colin, maître des sortilèges littéraires, tire une envoûtante intrigue où vont s'opposer Abel Spieler, kafkaïen fanatique et sorbonnard libertin, sa fille Julie, errant d'un compagnon à l'autre, entre Paris et Berlin, et surtout Else Falkenberg, la fillette enfin retrouvée.
 Autour de la poupée aux lettres, œil magnétique de ce redoutable cyclone psychodramatique, Colin fait tournoyer en virtuose trois êtres marqués par le siècle, dont il cisèle les portraits et millimètre l'évolution psychologique.

François Angelier , Le Monde des livres

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