Si Robert Capa est universellement connu, Gerda Taro, sa compagne – qui connut une ?n tragique à vingt-six ans, lors d’un reportage sur la guerre d’Espagne –, l’est beaucoup moins. Celle qui s’appelait en réalité Gerta Pohorylle avait fréquenté, à Leipzig, les milieux de gauche ; arrêtée en 1933 pour ses activités antinazies, elle s’exile à Paris où elle retrouve d’autres jeunes gens “étrangers” qui, comme elle, doivent lutter pour se faire une place, dans un climat d’antisémitisme de plus en plus oppressant. C’est aussi à Paris qu’elle rencontre André Friedmann pour lequel elle inventera le nom de Robert Capa, devenant elle-même Gerda Taro : une photographe à part entière, révélée, ces dernières années, par la découverte de la fameuse “valise mexicaine”.
Helena Janeczek a choisi d’aborder son personnage à travers le prisme de trois témoins qui ont partagé la vie et les passions de Gerda : Willy Chardack, étudiant en médecine, l’amie de cœur Ruth Cerf, journaliste, et Georg Kuritzkes, militant convaincu, qui s’engagera dans les Brigades internationales. Grâce à une construction romanesque subtile, Helena Janeczek fait revivre une ?gure étonnamment émancipée pour son époque, une femme élégante et lumineuse, plus proche de nous que jamais.
octobre, 2018
11.50 x 21.70 cm
384 pages
ISBN : 978-2-330-11380-3
Prix indicatif : 22.80€
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Ce roman était la pièce manquante au puzzle Taro car Helena Janeczek a su avec beaucoup de délicatesse nous la rendre attachante.
Une esquisse à plusieurs voix et un procédé narratif donnant à lire un récit à la fois vivant et captivant, l'histoire dans l'Histoire, d'une jeune femme à la force incroyable et qui trouvera la mort prématurément sur le chemin pour Madrid, en pleine guerre d'Espagne.
Dans une langue pétillante au service d’une construction stylée au millimètre, le roman d’Helena Janeczek dépeint une femme lumineuse, comète parmi les Hommes, qui aura marqué l’Histoire.
Ce livre est comme une planche-contact : si l'on s'y perd parfois, on y voit évoluer, dans les témoignages de ses amis, une jeune femme intrépide, passionnée, « agile comme un lévrier, résistante comme le cuir et parfois dure comme l'acier », séduisante et déterminée, silhouette émancipée au sourire lumineux, et dont les photos ont tout de même fini par révéler le talent.
De ce tourbillon, finit par émerger la « valise mexicaine », pleine de négatifs de Capa et Taro, qui remit sur le devant de la scène photographique l'étourdissante Gerda.
Ce roman rend justice à cette jeune Allemande venue à Paris dans les années 1930 pour fuir le nazisme et ressuscite une époque
bouillonnante où le monde s'apprête à basculer.
Évoquant la photographie, l'artiste italienne Tina Modotti disait que lorsque celle-ci « ne s'oriente que vers le présent et s'appuie sur ce qui existe devant l'objectif de l'appareil, elle s'affirme comme le moyen le plus incisif pour enregistrer la vie réelle dans toutes ses manifestations ». C'est exactement le projet de ce roman, assurément l'un des plus beaux de la rentrée littéraire 2018.