Au temps où la ville de Ravenne se proclame « capitale de l’Empire romain d’Occident » (Ve-VIe siècles), l’art ravennate exprime le grand souffle du christianisme latin. Il affirme aussi le refus des catholiques de se ranger sous l’autorité des empereurs orthodoxes grecs de Constantinople qui règnent sur le vaste Empire byzantin d’Orient. Ravenne n’est ni orthodoxe, ni grecque, ni soumise à l’Église d’Orient mais se réfère toute au monde romain et latin. De ce constat naît une radicale réinterprétation de l’art et de l’architecture ravennates, sur la base de sources romaines et latines, et ce, par-delà les parentés avec l’esthétique de Byzance.
À Ravenne, les premiers chefs-d’œuvre expriment, dès le IVe siècle, l’éclat somptueux d’une esthétique chrétienne certes héritière de l’Antiquité mais novatrice. Cette originalité se manifeste rapidement dans les vastes ensembles de mosaïques qui ornent l’intérieur des monuments ravennates et surprennent par leur infinie beauté. Succession chatoyante et étincelante de scènes figuratives et ornementales se déroulant en frises sur les conques absidales, sur la nef, au-dessus des portiques ou sur l’arc triomphal précédant l’autel, ces mosaïques, telles une « tapisserie somptueuse et inaltérable, tendue pour l’éternité » (L. Bréhier), confèrent une unité remarquable aux parois qu’elles parent de leurs tesselles multicolores.
Le mausolée de Galla Placidia (milieu du Ve siècle) est le premier chef-d’œuvre ravennate dont la polychromie, omniprésente, frappe par son intensité. Les baptistères octogonaux « des Orthodoxes » et des Ariens, bâtis tous deux sous Théodoric le Grand, montrent, dans leurs coupoles respectives, les douze apôtres entourant la scène du baptème. En 500, Théodoric fait ériger l’église Saint-Apollinaire-le-Neuf qu’il revêt de mosaïques formant une «Imago Mundi» d’une haute portée théologique et, à la fin de sa vie, il fonde la basilique Saint-Vital, à plan centré octogonal, où la magnificence des mosaïques flanquant l’autel principal saisit celui qui les contemple. Son mausolée (vers 520-526), de pierre nue, tranche avec le chromatisme tendre du décor de mosaïques de la basilique Saint-Apollinaire-in-Classe, achevée une dizaine d’année après Saint-Vital, et sa vision idéale et pure. En inscrivant l’art de Ravenne dans l’héritage de la Rome paléochrétienne plutôt que dans l’histoire « officielle » de Byzance, Henri Stierlin restitue aux chefs-d’œuvre ravennates leur rôle éminent. Et les photographies d’Adrien Buchet et d’Anne Stierlin s’attachent toutes à révéler la prodigieuse beauté d’un art infini.
octobre, 2014
26.00 x 30.00 cm
232 pages
ISBN : 978-2-330-03665-2
Prix indicatif : 79.00€
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(…) l'approcher en silence est comme traverser le temps, ou le miroir, et se retrouver dans une cité enchantée, offrant de telles merveilles que Dante, Boccace, lord Byron, Hermann Hesse, Freud, Oscar Wilde ou Klimt en furent ensorcelés, et que Carl Gustav Jung, entrant dans le baptistère de Néon, crut être pris d'hallucinations. (…) [Ces merveilles], Ravenne les montre presque toutes, et, grâce au gros plan photographique, en fait saisir la merveille, technique et esthétique.